Critiques

Godin : le travail de l’utopie

Ce livre (les belles lettres 2009) est l’œuvre de Michel Lallement Professeur au Conservatoire National des Arts et Métiers. Il restitue l’œuvre et la vie de Godin (1817-1888) à travers les archives du Familistère qu’il avait fondé à Guise dans le département de l’Aisne. Godin est tout d’abord un manufacturier, ses poêles en fonte sont restés célèbres jusqu’à aujourd’hui. Pétri de la pensée saint-simonienne et fouriériste, il sera de ceux qui pousseront le plus loin la mise en pratique de ce  socialisme utopique, qui tente en vain de donner une base théorique à la question sociale marquée par une prolétarisation croissante qui menace l’ordre même du capitalisme naissant.

 

L’intérêt de ce livre, c’est de mettre en lumière l’œuvre de Godin mais aussi les limites de sa démarche. La collaboration organique du capital et du travail comme pierre angulaire de la pensée et de l’action de Godin montre ses limites au sens ou, les intérêts inconciliables du capital et du travail travaillent les contradictions qui verront naître une classe ouvrière se constituant sur la base de ses propres intérêts. Les socialistes révolutionnaires ne se privèrent pas de critiquer férocement Godin en ce qu’il visait à maintenir la domination du capital alors que de leur point de vue, seule la disparition du prolétariat en abattant le capitalisme était de nature émancipatrice. Marx participa à ce débat avec un point de vue similaire.

 

Au bilan, il s’agit d’un livre intéressant, aussi bien par rapport à l’œuvre de Godin lui-même, pensons ici aux avancées en matière d’architecture avec le familistère (aujourd’hui classé monument historique) que scolaire, mais aussi un livre qui nous montre la naissance de l’industrie manufacturière et les questions sociales qu’elle a engendrée.